L’intelligence artificielle au volant pose autant de défis techniques que de questions sociales, juridiques et politiques. En amont de la table-ronde de l’Académie intitulée « Voiture autonome, voiture intelligente ? », un sondage organisé pour l’occasion révèle la perception du public.
« Une bonne technologie ne devrait pas être dangereuse », explique le professeur Hervé Bourlard. Plus de 30% des sondés pour l’occasion estiment même qu’une voiture autonome devrait être plus fiable que les véhicules actuels pour qu’ils soient intéressés par cette technologie. C’est dans ce contexte qu’Hervé Bourlard, membre de la SATW et directeur de l’Institut de recherche IDIAP, Anne Mellano, co-fondatrice de Best Mile SA et Yves Gerber, responsable communication du TCS, ont pu discuter de l’impact de l’intelligence artificielle sur la conduite.
« Je doute très fortement qu’une intelligence artificielle compréhensible pour l’humain soit possible. Il faudrait plutôt parler de niveaux de confiance », selon Hervé Bourlard. Le fait que 61% des sondés répondent que le constructeur devrait être tenu pour responsable lors d’un accident causé par une voiture autonome abonde dans ce sens : la relation avec l’intelligence artificielle est basée sur le facteur humain de la confiance.
Les réglementations en préparation, notamment au niveau européen, pour que le processus décisionnel de l’intelligence artificielle puisse être compréhensible témoigne du souci d’établir les responsabilités. « Le droit actuel définit le conducteur comme étant responsable de son véhicule », précise Yves Gerber du TCS. Une préoccupation bien comprise par les Suisses romands interrogés qui pensent à 47% que les lois doivent être adaptées avant que les véhicules autonomes ne puissent circuler.
Si les défis restent encore nombreux, 31% des participants au sondage indiquent être pourtant déjà prêts à monter dans un véhicule autonome en conditions réelles. A l’inverse près d’un quart ne souhaite pas cette technologie et 36% attendent qu’elle soit améliorée avant de vouloir l’essayer. Mais surtout 41% des sondés estiment également que le conducteur doit pouvoir reprendre le contrôle d’un tel véhicule.
Étonnamment, les jeunes de moins de 18 ans préfèrent à plus de 50% attendre que la technologie soit fiable, contre seulement 15% d’entre eux déjà prêts à la tester en conditions réelles. En revanche les plus de 60 ans sont plus de 38% à être déjà prêts à tenter l’aventure sur route aujourd’hui.
Si la voiture autonome suscite des craintes en termes de sécurité, elle semble aussi répondre à de nouveaux modes de vie. Ainsi, les jeunes actifs sont particulièrement intéressés par le fait de pouvoir utiliser le temps passé sur la route pour faire autre chose, à l’instar du train. Yves Gerber imagine même que « les constructeurs automobiles devront se repenser comme prestataires de service. »
De même, il y a à peu près autant de personnes intéressées par la possession d’un véhicule autonome à titre strictement personnel qu’à des fins de partage public de type taxi libre-service, car sharing ou transport en commun. « La frontière entre transports public et privé va probablement s'estomper », avance Anne Mellano, qui ajoute que « les véhicules autonomes vont aussi redéfinir les besoins en mobilité. »
Certains vont déjà plus loin et imaginent la possibilité de ne plus avoir besoin de permis de conduire pour que même les enfants ou les personnes âgées puissent se déplacer seuls en voiture.