L’importance de l’hydrogène et des sources d’énergie synthétiques pour la mobilité, la décarbonation et le stockage de l’énergie

Énergie et environnement 08:42

Assurer un avenir énergétique durable passe par la mobilisation de différentes technologies, sources d’énergie et méthodes de stockage. Les milieux de l’industrie et de la recherche en sont convaincus : l’hydrogène et autres carburants de synthèse jouent un rôle important pour y parvenir. Cet enjeu figure également à l’agenda politique : ainsi, le Conseil fédéral a annoncé une stratégie nationale en matière d’hydrogène pour 2024. Et du côté de l’Union européenne, on plaide pour la mise en place d’un vaste écosystème de l’hydrogène. Afin de mieux cerner le potentiel et les enjeux liés à ces sources d’énergie, la SATW a organisé, conjointement avec le Center for Sustainable Future Mobility (CSFM) de l’ETH Zurich, un forum d’expert·e·s le 23 avril 2024.

Le forum sur l’hydrogène de la SATW a brossé un tableau complet de l’état des progrès technologiques, des applications et des stratégies utilisées par l’industrie en matière d’hydrogène et de sources d’énergie synthétiques. Le forum était organisé et animé par deux experts de la SATW : Prof. Dr.  Konstantinos Boulouchos et Dr. Bernhard Braunecker. Près de 40 personnes issues du secteur de l’industrie, d’associations, d’administrations et du milieu de la recherche ont saisi cette opportunité d’échanger sur ce thème spécifique et de nouer des liens. Les informations et opinions échangées feront l’objet d’une fiche technique de la SATW sur le thème de l’hydrogène.

Dans son introduction, Dr. Ulrich Claessen, président du Conseil industriel de la SATW, a souligné l’importance de ce sujet pour de nombreux secteurs.

Dans sa présentation introductive, Dr. Michael Krüger (Robert Bosch GmbH) a ensuite abordé la question de l’avenir des carburants verts dans les véhicules utilitaires équipés de moteurs à combustion. Si le constructeur cible délibérément le segment des véhicules utilitaires et non celui des voitures de tourisme, c’est parce que ce dernier mise déjà sur les motorisations électriques pour assurer sa transition énergétique. En optimisant les moteurs diesel traditionnels sur le plan de la technique et du système de commande et en traitant leurs gaz d’échappement au moyen de catalyseurs, les véhicules utilitaires peuvent satisfaire aux normes Euro 7 et CARB Low NOx en matière de polluants atmosphériques.
Mais pour réduire significativement les émissions de dioxyde de carbone et générer un véritable impact pour le climat, une solution renouvelable, comme l’hydrogène ou les e-carburants, s’impose. Grâce aux technologies en cours d’expérimentation chez Bosch, les véhicules utilitaires propulsés par un moteur à combustion à hydrogène pourraient bientôt rouler en rejetant une quantité très faible d’émissions. Mais la rentabilité de l’hydrogène devra être déterminée au cas par cas et dépendra fortement de l’intensité d’utilisation des véhicules.

Prof. Andreas Züttel (EPFL/SATW) a évoqué le rôle de l’hydrogène dans la transition énergétique, notamment comme moyen de stockage de l’électricité, dont la production fluctue de plus en plus en raison de la part croissante des sources renouvelables. Il a rappelé que les seules batteries ne constituent pas une solution réaliste pour répondre à l’enjeu du stockage saisonnier. Les importantes pertes d’énergie engendrées pour transformer l’électricité en hydrogène stockable (par électrolyse) avant leur reconversion en énergie exploitable, ainsi que l’aménagement d’infrastructures de stockage et de transport fiables représentent des défis majeurs et des facteurs de coûts considérables.

La présentation de Dr. German Weisser (WinGD) portait sur les carburants de synthèse pour le secteur du transport maritime. Créée par Sulzer, l’entreprise suisse WinGD compte aujourd’hui parmi les leaders mondiaux des moteurs à combustion pour les grands navires de commerce, moteurs qu’elle perfectionne en vue de leur utilisation avec des carburants de synthèse. À l’heure actuelle, le transport maritime international est responsable de plus de 2 % des émissions anthropiques de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale. Selon les estimations, WinGD pourrait les réduire de moitié avec ses produits, ce qui correspond à dix fois les émissions nationales de la Suisse ! L’intervenant a précisé que, dans un avenir proche, l’hydrogène ne devrait pas jouer de rôle majeur en tant que carburant dans le domaine du transport maritime au long cours, mais que l’on se dirige plutôt vers une combinaison de sources d’énergie synthétiques liquides.

Dr. Philipp Dietrich (H2 Energy SA) a abordé la question de la décarbonation du système énergétique avec de l’hydrogène renouvelable et a présenté le projet d’une grande usine de production d’hydrogène au Danemark. Au travers d’un projet pilote de camions équipés de piles à combustible à hydrogène, il a démontré que leur consommation d’énergie par charge utile transportée et par trajet était moins de 10 % plus élevée que pour un camion roulant à l’électricité, ce qui en fait une alternative intéressante. Le projet de production d’hydrogène en passe de se concrétiser au Danemark impressionne par sa taille : alimentée par de l’énergie éolienne, sa capacité électrique atteindra la puissance de la centrale nucléaire de Gösgen.

Pour conclure, Dr. Andrea Ciani (Ansaldo Energia Switzerland AG) a expliqué les dernières avancées réalisées pour que les turbines à gaz, qui utilisent actuellement du gaz naturel pour produire de l’électricité, puissent fonctionner avec de l’hydrogène. Les tests réalisés avec succès laissent augurer une commercialisation de ces systèmes à l’horizon 2030.

Les exemples issus de l’industrie font état d’avancées majeures en vue d’une utilisation de l’hydrogène pour la mobilité et le stockage de l’énergie. Il en ressort que cette technologie pourra bientôt contribuer à la décarbonation. Les entreprises suisses jouent un rôle prépondérant à cet égard. La place qu’occupera à l’avenir l’hydrogène dans l’approvisionnement énergétique de la Suisse ainsi que la collaboration que la Suisse entretiendra avec l’Europe et, plus largement, avec le reste du monde, dépend aussi de différents facteurs économiques et politiques qu’il n’est pas encore possible d’évaluer pleinement à l’heure actuelle.

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